Pour 2015-2016, le Centre culturel Hâ 32 reprend ses activités sur le thème du corps (« Le corps en questions »), sous la forme de « midi-14 » (déjeuner débat, à 12h30) et en soirée (conférence avec débat, à 20h). L’entrée est libre.
Parmi les questions en débat :
- Quelle conception du corps transparait dans les principaux systèmes de pensée, voire même dans la médecine, aussi bien dans le temps que dans l’espace ?
- Jusqu’à quel point le corps pourra-t-il être « augmenté », tant par les diverses prothèses déjà utilisées que par les adjonctions largement prévisibles, voire des régénérations partielles de tissus, d’organes, de fonctions ?
- Jusqu’où repousser les limites des possibilités physiques du corps ?
- Comment le corps est-il pris en compte par l’artiste, le « designer », l’architecte, dans l’exercice de leur art ou dans la conception de leurs ouvrages ?
- Le corps doit-il être accepté tel qu’il a été reçu ou peut-on en augmenter les performances, l’aspect, voire l’équilibre physiologique, pour satisfaire à des considérations liées à la civilisation, à l’évolution des mœurs, au désir de se singulariser ?
Midi-14 du 19 novembre 2015 – Le corps dans la danse contemporaine, jeudi 19 novembre, avec Lucie Madonna (Conseillère pédagogique « Danse » au Conservatoire de Bordeaux)
Le corps dans la danse contemporaine :
- Corps matière
- Corps sensible
- Corps paysage
- Corps quotidien
- Corps virtuose
- Corps abstrait ou théâtralisé
Quelque soit le point de départ d’un chorégraphe, le corps du danseur dans la danse contemporaine se veut sensible et poétique. Les enjeux sont esthétiques et induisent souvent une philosophie singulière de l’art et de l’humain. A travers quelques exemples analysés, nous tenterons de discerner certains grands courants de la danse contemporaine.
Lucie MADONNA
Midi-14 du 7 janvier 2016 – Le corps entre sexe et genre, jeudi 7 janvier, avec Claude Esturgie (Médecin sexologue)
Le désenchantement du sexe
Dialectique du désir et de l’amour de Claude Esturgie
De l’Antiquité à nos jours, en Occident, le sexe a pu être :
- parfois enchanté, c’est-à-dire sublimé, au mieux par l’amour ou l’érotisme, au pire par sa diabolisation ;
- parfois désenchanté, c’est-à-dire clivé de tout affect, de tout imaginaire.
C’est grâce à la littérature, la poésie, le roman, la philosophie, la psychanalyse, le cinéma, mais aussi grâce à son expérience clinique personnelle, que l’auteur s’est intéressé à cette évolution pour aboutir à l’époque contemporaine où le développement exponentiel de la technique entraîne, là encore, ce désenchantement dont avaient parlé de façon plus générale Max Weber et Marcel Gauchet.
Aucun déclinisme cependant dans son propos, mais un questionnement sur la possibilité d’une nouvelle alchimie entre le désir, l’érotisme et l’amour.
Claude Esturgie est médecin, sexologue, vice-président de la Société Française de Sexologie Clinique, auteur de nombreux articles et d’un ouvrage sur le genre intitulé Questions de genre ou le genre en question, paru à Paris chez Léo Scheer en 2008.
Table des matières
Introduction
- L’enchantement du sexe
- L’Antiquité
- Le monde chrétien et le Moyen-Âge
- L’amour courtois
- Tristan et Yseut, Héloïse et Abélard
- Dans le sillage des troubadours
- Montaigne et la réalité sexuelle
- L’âge classique et les Lumières
- Le romantisme et le triomphe de la bourgeoisie
- Le surréalisme
- Temps actuels, l’avènement de la technique
- Libération ou désenchantement
- La sexologie en France
- L’ère numérique
- La pornographie
- Le libertinage
- Nouvelles possibilités de rencontres
- La prostitution
- Érotisme ou pornographie ?
- Les ambiguïtés de la sexologie, sexologie ou médecine sexuelle ?
- Quand le genre fait sa révolution
- Épilogue
Post-Scriptum :
La Sexoanalyse Claude Crépault Payot 1997, toujours en vente
Trouble dans le genre Judith Butler La Découverte 2005
Le genre en question ou questions de genre Claude Esturgie Léo Scheer 2008
Le désenchantement du sexe, dialectique de l’amour et du désir Claude Esturgie L’Harmattan ( sort deuxième quinzaine de janvier 2016 )
Midi-14 du 14 janvier 2016 – Le corps humain : Y a-t-il un pilote dans l’avion ? Jeudi 14 janvier, avec Annie Mac Leod (Docteur en neuro-sciences)
Quand la discorde survient entre le corps et le cerveau.
Malgré de nombreuses recherches en Neurosciences, le fonctionnement du cerveau reste encore mal connu. Certains comportements peuvent sembler étranges, voire surprendre aussi bien la personne elle-même que ceux qui la regardent. Nous chercherons à éclairer ce questionnement en nous appuyant sur des données scientifiques, sur des exemples comme les tics du syndrome de Gilles de la Tourette.
Soirée avec débat du 4 février 2016 – Le corps photographié : entre célébration et profanation, avec Claude PITOT (Photographe et auteur)
Conférence « le corps photographié, entre célébration et profanation »
Comment la photographie représente-t-elle le corps humain ? Prenant appui sur les images de grands photographes du 19ème siècle à nos jours,l’exposé montrera la diversité et la richesse de la représentation du corps. Les contextes historiques et sociaux, les tendances artistiques ont en effet engendré, entre tradition et innovation,des images très différentes du corps. Souvent exalté, objet de désir, parfois observé, objet de contrôle, mais aussi parfois dégradé voire outragé, le corps photographié fait l’objet d’incessantes interrogations.
Claude Pitot
Midi-14 du 3 mars 2016 – Transhumanisme : pseudo-science et pseudo-humanisme, avec Philippe Garrigues (Directeur de recherches au CNRS)
« D’aucuns prétendent que l’être humain qui vivra 1000 ans est déjà parmi nous.
Les progrès de ces dernières années en biologie, dans la science des matériaux, en informatique et en miniaturisation des systèmes, ouvrent des perspectives d’augmentation des capacités humaines, de la réalisation de cyborgs, de robots et autres hommes/machines bien au delà de ce que la science fiction a pu imaginer.
La présentation fera état de l’historique et des dernières avancées sur les disciplines »
Soirée avec débat du 17 mars 2016 – La peau, entre l’intime et le collectif (conférence illustrée), avec Anne Varichon (Anthropologue)
A travers des exemples puisés dans diverses cultures, il s’agira de percevoir comment, autour d’une entité aussi personnelle que le corps, peuvent se croiser des gestuelles et s’élaborer des rituels qui participent à la définition de l’individu dans la société qui est la sienne, et érigent la peau comme espace de communication entre soi et l’autre.
Anne Varichon est anthropologue. Elle mène depuis une vingtaine d’années des recherches sur la couleur, ses matériaux, savoirs, procédés, pensées et interroge ses usages dans les actes de la vie quotidienne, les rites, les processus créatifs, l’imaginaire social et les identités collectives, notamment lorsqu’elle est apposée sur le corps.
Elle a, entre autres, publié aux éditions du Seuil :
- Couleurs, Pigments et teintures dans les mains des peuples (2000, 2005, traduit en espagnol, japonais, anglais, coréen, prix Prisme 2009),
- Le corps des peuples, us et coutumes de la propreté et de la séduction (2003)
Soirée avec débat du 31 mars 2016 – Corps des dieux, corps des hommes dans la mythologie grecque, avec Claude-Gilbert DUBOIS (Professeur honoraire à Bordeaux Montaigne)
« La peur que le corps inspire à l’esprit a rendu fous bien des gens », déclare D.H. Lawrence, l’auteur de Lady Chatterley. La mythologie grecque, comme plus tard l’art grec, n’ont pas peur du corps, qu’ils magnifient. La Chair y précède le Verbe.La grande déesse-mère, mater-materia, libère toutes les énergies productrices de vie, engendrant des êtres de chair en évolution. Les dieux, enfants de la déesse-mère, pourvus de pensée organisatrice (le logos) ne viennent qu’après, pour faire de la matière chaotique un univers ordonné (le cosmos). C’est là une conception à base matérialiste, à démarche évolutionniste et à finalité progressiste de l’histoire du monde.
Par contre, la philosophie grecque classique, notamment le platonisme, jusqu’en ces derniers avatars, comme l’hermétisme, fait la démarche inverse. Au début, il y a la Pensée (Noûs, la lumière du jour, symbolisée par Jupiter, accouchant par la tête d’une vierge armée, Athèna, l’Idée). L’Idée se fait projet lisible (logos). Le projet libellé se réalise ensuite, éventuellement, en objet matériel. A chaque étape, le principe d’entropie ou de dégradation aboutit à une perversion de l’Idée dont le dernier réceptacle est le corps, dernier degré d’abaissement, avant la régénération de l’Idée.
Le christianisme reçoit en héritage cette double tradition. Le principe de l’Incarnation a parfois valorisé le corps. Le contraire s’est aussi produit. La Chair n’a été admise que sous une forme sublimée, ramenée à une pureté virginale ou à une intellectualité aseptisée, ou vouée à l’Enfer des désirs inassouvis.
Midi-14 du 7 avril 2016 – L’homme augmenté, mythes et limites, avec David Pucheu (Sociologue des techniques)
Parler d’homme augmenté relève du pléonasme : il y a très longtemps que, sans en avoir clairement conscience, l’homme s’est augmenté. Maîtriser le feu lui a permis d’étendre le nombre des aliments qu’il pouvait consommer et assimiler. Écrire a été un moyen d’outrepasser les limites de la mémoire. Utiliser un moyen de locomotion lui a permis de couvrir des distances plus grandes, avec une fatigue moindre…Autant d’exemples qui montrent que cette démarche est depuis longtemps inscrite dans l’histoire des hommes. Pourtant avec l’avènement de la révolution industrielle, avec les machines utilisant la vapeur puis l’électricité, une sorte de dialogue s’est établi entre l’homme et la machine, l’un se servant de l’autre ou la servant. On a adapté les machines à l’homme par une ergonomie étudiée, mais on a aussi amené l’homme à s ‘adapter à la machine, dans une vision organiciste de celui-ci. Ses mouvements ont été scrutés et décomposés en séquences, de manière à éliminer temps morts et gestes inutiles, dans un souci de rentabilité du système de production. Avec le numérique et les biotechnologies, un nouveau seuil a été franchi, la mathématisation du monde est en marche. La biotechnologie ouvre à la manipulation du vivant….
De la convergence…
Dans le domaine militaire des recherches ont depuis longtemps été menées pour parvenir à une meilleure efficacité des dispositifs défensifs ou offensifs. Ainsi pour intercepter une bombe, il faudra en connaître notamment la vitesse et la trajectoire pour pouvoir l’atteindre avant qu’elle n’ait anéanti sa cible. Il faudra donc munir le dispositif d’interception de capteurs permettant de mesure ces données et d’une mémoire pour les confronter et adapter ainsi l’intervention du dispositif. On pourra même envisager de mettre au point une machine capable de fonctionner sans autre intervention humaine que celle de son concepteur. Actuellement des machines sont capables de stocker et d’analyser les traces laissées par l’homme (localisation par son téléphone portable, profilage commercial par les achats qu’il a payés au moyen de sa carte bancaire, ensemble de ses relations personnelles telles que permettent de les établir ses mails ou ses « amis » sur la Toile…). De même des machines sont capables, grâce à leur puissance de calcul, d’apprendre, d’écrire des romans…De là est apparue l’idée d’une convergence entre les organismes vivants et les machines, l’idée de créer une sorte d’être hybride susceptible d’être amélioré, comme une machine peut l’être, le corps devenant une sorte d’interface à différents dispositifs techniques propres à en améliorer les performances dans les domaines les plus divers : exosquelette, casque de réalité augmentée, prothèses mues à partir des influx neuronaux visant à l’exécution de mouvements…
… à l’immortalité…
Les biotechnologies ont fait penser que l’immortalité est à la portée de l’homme ! Ces techniques recèlent des enjeux humains et économiques considérables, car si les recherches qu’elles supposent mobilisent des moyens considérables, elles suscitent des appétits encore bien plus importants. Seules de très grandes sociétés nanties de moyens économiques colossaux ont la possibilité de s’engager dans ces recherches, avec l’ambition non déguisée non seulement d’en tirer le plus grand profit mais surtout de s’assurer une position de domination. Mais alors que son avenir est en question, voire en danger, que peut faire l’homme ? Bien sûr, chaque citoyen est appelé à une réflexion sur le choix de société. Il s’agit d’un débat politique, au sens le plus élevé du terme, dans lequel les intellectuels et les responsables religieux doivent trouver leur place, sans que le champ soit laissé entièrement libre aux apprentis sorciers.
Jean-Pierre Bouscharain
Soirée avec débat du 9 juin 2016 – Musiques et corps, quelques figures : celle du mélomane, de l’interprète, du chef d’orchestre, avec Jean Bauer (Musicologue)
« Bien des musiques nous sont imposées…Pourquoi le silence est-il aussi rare ? Comment notre corps réagit-il quand nous allons au concert ou que nous écoutons des disques ?
Selon l’instrument pratiqué, les interprètes de musiques, classique, de jazz, de rock ont dressé leur corps durant de nombreuses années pour le maîtriser ? Nombreuses sont les maladies professionnelles liées aux pratiques musicales…
Nous tenterons d’échanger autour des faits, pour évoquer les liens entre corps du mélomane, celui de divers interprètes (chanteurs, instrumentistes et chefs d’orchestre) et les musiques.
Jean BAUER
Musicologue
Soirée avec débat du 23 juin 2016 – Neurosciences et cognition : de l’étude du cerveau à la compréhension du comportement. Illustrations chez le singe, avec Aurore San Galli (Docteur en Neurosciences)
Le champ des neurosciences est extrêmement vaste puisqu’il regroupe différents domaines d’expertise (e.g. mathématiques, psychologie, médecine, physiologie) tous consacrés à l’étude du système nerveux. Après une introduction générale sur les neurosciences et leur évolution au cours de l’histoire des sciences, je me consacrerai à la présentation d’un domaine : les neurosciences comportementales et cognitives, en particulier chez l’animal. La cognition désigne l’ensemble des processus mentaux et intellectuels, à la base de notre comportement. L’étude de la cognition animale aborde ainsi des questions telles que : l’animal a-t-il une conscience, une mémoire, une raison ? Comment se représente-t-il le monde ?
A titre d’exemple, je présenterai deux de mes projets chez les primates non-humains portant sur des problématiques différentes :
- 1) la motivation et la prise de décision (comment la perspective d’un effort et d’une récompense est encodée dans le cerveau et influence nos choix),
- 2) la théorie de l’esprit (attribution d’un état mental à autrui, à la base des interactions sociales).
Nous verrons que comprendre les fondements psychologiques et cérébraux (régions du cerveau mises en jeu) de ces fonctions cognitives chez l’animal permet d’appréhender les réponses comportementales et certaines pathologies humaines.
Aurore San-Galli
Samedi théologique du 16 janvier 2016 – « La théologie du corps dans le Nouveau testament selon Rudolf Bultmann », animé par Marc SPINDLER (pasteur retraité de l’Église protestante unie de France)